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LA THÉOGONIE

Filles de Zeus, je vous invoque. Donnez-moi des chants dignes de plaire. Dites cette race divine et immortelle, qui naquit de la terre, du Ciel étoilé, de la Nuit obscure, ou sortit du sein de l’onde amère ; dites comment furent avant le reste et la terre, et les fleuves, et l’immense mer, dont les flots se gonflent et s’agitent, et les astres rayonnants et au delà le vaste ciel, et les enfants de ces dieux, les dieux auteurs de tous biens ; dites quelles possessions, quels honneurs ils obtinrent en partage, comment pour la première fois ils occupèrent l’Olympe aux sinueux replis ; dites-moi toutes choses, ô Muses, dont l’Olympe est le séjour, et, les reprenant dès l’origine, enseignez-moi d’abord par où tout a commencé.

Au commencement donc fut le Chaos, puis Géa au vaste sein, éternel et inébranlable soutien de toutes choses, puis, dans le fond des abîmes de la terre spacieuse, le ténébreux Tartare, puis enfin l’Amour, le plus beau des immortels, qui pénètre de sa douce langueur et les dieux et les hommes, qui dompte tous les cœurs, et triomphe des plus sages conseils.

Du Chaos et de l’Érèbe naquit la noire Nuit ; de la Nuit, l’Éther et le Jour, fruits de son union avec l’Érèbe. À son tour, Géa engendra d’abord, égal à elle-même en grandeur, Ouranos, qui devait la couvrir de toutes parts de sa voûte étoilée, et servir éternellement de séjour aux bienheureux immortels. Elle engendra les hautes Montagnes, demeure des Nymphes qui habitent leurs riants vallons ; elle produisit, sans l’aide de l’amour, la Mer au sein stérile, aux flots qui se gonflent et s’agitent. D’elle et d’Ouranos naquirent le profond Océan, Cœus, Crios, Hypérion, Japet, Théa, Rhéa, Thémis, Mnémosyne, et Phé-