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NOTICE SUR SOLON

mais le complice de leur fraude. Ce soupçon injurieux fut bientot détruit, quand on le vit aux termes de sa loi, faire la remise de cinq talents qui lui étaient dus, ou même de quinze, selon quelques auteurs, et entre autres Polyzelus de Rhodes. Cependant ses trois amis furent appelés depuis les Créocopides. Cette ordonnance déplut également aux deux partis : elle offensa les riches qui perdaient leurs créances, et mécontenta encore plus les pauvres qui se voyaient frustrés du nouveau partage des terres qu’ils avaient espéré, et qui n’obtenaient pas cette parfaite égalité de biens que Lycurgue avait établie entre les citoyens. Mais Lycurgue était le onzième descendant d’Hercule ; il avait régné plusieurs années à Lacédémone ; il y jouissait d’une grande autorité ; il avait beaucoup d’amis ; il possédait de grands biens ; et tous ces avantages lui furent d’un grand secours pour exécuter son plan de réforme. Avec tout cela, il fut obligé d’employer la force plus encore que la persuasion ; il lui en coûta un œil pour faire passer la plus importante de ses institutions, la plus propre à rendre sa ville heureuse, à y maintenir la concorde, en ne laissant parmi les citoyens ni riche ni pauvre. Solon, au contraire, né d’une famille plébéienne dans une condition médiocre, ne pouvait aspirer à une pareille entreprise ; mais du moins ne resta-t-il pas au-dessous des moyens qu’il avait en sa puissance, n’étant soutenu que par sa sagesse et par la confiance, qu’on avait en lui. Au reste, il témoigne lui-même que cette loi avait offensé la plupart des

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