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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

nouveau Curette, le fils de la nymphe Balté. Dès qu’il fut arrivé à Athènes, il s’y lia d’amitié avec Solon, l’aida à rédiger ses lois et lui fraya la route pour disposer les Athéniens à les recevoir, en les accoutumant à moins de dépense dans leur culte religieux et à plus de modération dans leur deuil. Il leur apprit d’abord à faire, à leurs funérailles, certains sacrifices qu’il substitua aux pratiques superstitieuses, aux coutumes dures et barbares, auxquelles la plupart des femmes étaient auparavant fort attachées[1]. Mais ce qui était plus important, il fit un grand nombre d’expiations et de sacrifices ; il fonda plusieurs temples et, par ces différentes cérémonies, il purifia entièrement la ville, en bannit l’impiété et l’injustice et la rendit plus soumise, plus disposée à l’union et à la paix. On rapporte aussi que, lorsqu’il vit le fort de Munychium, il le considéra longtemps et dit à ceux qui l’accompagnaient : « Que les hommes sont aveugles sur l’avenir ! Si les Athéniens pouvaient prévoir tous les maux que ce lieu doit un jour causer à leur ville, ils l’emporteraient à belles dents. » Thalès eut aussi, dit-on, un pressentiment à peu prés semblable. Il ordonna qu’on l’enterrât dans le lieu le plus sauvage et le plus désert du territoire de Milet ; et il prédit aux Milésiens qu’un jour leur marché public y serait transporté. Les Athéniens pleins de reconnaissance et d’admiration pour Épiménide, voulurent

  1. Les femmes athéniennes avaient coutume, dans ces occasions, de se meurtrir et de se déchirer le visage.