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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

inventé le fond de leurs poèmes ; ils le tenaient en grande partie de la tradition, et d’une tradition déjà, sans doute, développée en des chants nombreux. Leur gloire est d’avoir su tirer, de ce travail antérieur, de l’esprit grec, ces formes aussi fortes que neuves, éminemment vivantes, artistes, poétiques, l’un de l’épopée héroïque, l’autre de l’épopée religieuse.

Tout annonce que des écoles, ou plutôt que des familles de chantres, réputés enfants d’Apollon et des Muses, existèrent en Grèce, longtemps avant Homère et Hésiode, dans la Piérie, au pied de l’Olympe, et dans la Béotie, voisine de l’Hélicon. Là chantèrent ces Aèdes sacrés, que la tradition présente comme les premiers instituteurs des Grecs, comme ceux qui les initièrent à une vie meilleure, à des croyances plus saintes, par le pouvoir de la musique. Hors ce fait général, nous ne savons rien de certain sur ces origines poétiques de la poésie ; les noms mêmes, aussi bien que les histoires merveilleuses qui s’y rattachent, sont justement suspects ; Homère et Hésiode paraissent les avoir ignorés, en grande partie du moins, et il n’est pas téméraire de penser que la plupart étaient des créations mythiques d’un temps postérieur.

Quoi qu’il en soit, nous admettons qu’il y eut en Grèce d’antiques foyers d’une poésie, fille de la religion, et qui lui demeura plus ou moins intimement unie. À ces foyers se rattachent encore, malgré la distance des temps et les révolutions des peuples, Homère et Hésiode eux-mêmes, l’un de loin, l’autre de près. Tous deux