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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

Hésiode, en effet, et Homère me paraissent être mes aînés de quatre cents ans et pas davantage. Ce sont eux qui ont composé la théogonie des Hellènes, qui ont donné aux dieux leurs surnoms, qui leur ont assigné des fonctions et des honneurs distincts, et qui ont décrit leurs figures. Quant aux poètes que l’on dit avoir existé avant ces deux hommes, ils sont venus, à mon sens du moins, après eux… Ce qui regarde Hésiode et Homère, c’est moi qui le dis. » (Hérodote, Euterpe, 53).

Nous nous proposons, dans cette dissertation, de donner quelques preuves nouvelles à l’appui de cette affirmation célèbre du père de l’histoire, en ce qui concerne la Théogonie d’Hésiode. De quelque ténèbres que soit environnée l’origine de ce poème, comme celle de l’épopée grecque en général, quelque nombreuses altérations qu’il ait eues à souffrir dans le cours de sa transmission, si longue et si diverse depuis la haute antiquité jusqu’à nos jours, il nous semble qu’une analyse vraiment critique peut, aujourd’hui encore, faire ressortir en lui tous les caractères de l’unité primitive de conception et de composition. Il nous semble que sous cette forme, en apparence incohérente, et mutilée en réalité, qui porte la double trace des ravages du temps et de l’infidélité des hommes, existe un enchaînement intérieur, une organisation du fond, en un mot, une pensée créatrice, qui domine l’ensemble, rattache entre elles, par un lien nécessaire, les parties de l’ouvrage et y révèle la main d’un poète. Il nous semble enfin que les Sages de la