Page:Poètes Moralistes de la Grèce - Garnier Frères éditeurs - Paris - 1892.djvu/186

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
179
SENTENCES DE THÉOGNIS DE MÉGARE

Je marche dans la droite voie, sans incliner d’aucun côté, car il me faut voir tout avec justesse (945-946).

Je servirai ma patrie, cette riche cité ; je ne me tournerai point vers le peuple, et ne céderai point non plus aux caprices des citoyens injustes (947-948).

J’ai, comme le lion confiant en sa force, atteint à la course et saisi le jeune faon sous le ventre de sa mère, mais je n’ai pas bu son sang ; j’ai franchi les remparts et n’ai point ravagé la ville ; j’ai attelé les coursiers et ne suis point monté sur le char : ce que j’ai fait est resté sans effet ; ce que j’ai accompli, sans accomplissement ; j’ai agi sans agir, fini sans finir (949-954).

Du bien qu’on fait aux mauvais résulte un double mal : on le retranche à soi-même et l’on n’obtient pas de reconnaissance (955-956).

Si, ayant reçu de moi quelque important bienfait, tu n’en es pas reconnaissant, puisses-tu, dans un nouveau besoin, revenir à ma maison (957-958) !

Tant que j’ai puisé moi-même à la source profonde, l’eau m’en a semblé belle et douce. Maintenant qu’on l’a rendue trouble et fangeuse, j’irai boire à quelque autre fontaine ou à quelque fleuve (959-962).

Avant de louer un homme, il importe de connaître exactement son caractère, ses principes, ses habitudes. Beaucoup fardent leur vie, se cachent sous des apparences trompeuses, revêtent pour la journée un personnage étranger. Mais, à la fin, le temps les fait paraître avec leurs mœurs réelles. Moi-même, je me suis bien écarté de la vérité, me pressant de te louer, sans t’avoir auparavant bien étudié. Aujourd’hui, comme un vaisseau, je prends le large (963-970).