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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

La mort, cher Cyrnus, vaut mieux pour le pauvre que la vie avec le supplice de pauvreté (181-182).

Nous recherchons, Cyrnus, des béliers, des ânes, des chevaux de bonne race, pour qu’ils nous donnent des rejetons qui leur ressemblent. Mais l’homme bien né ne refuse pas de prendre pour femme la fille d’un vilain, si elle lui apporte beaucoup de bien. Point de femme, non plus, qui ne consente à devenir l’épouse d’un vilain, s’il est riche, qui ne préfère l’homme opulent à l’honnête homme. On ne fait cas que des richesses ; l’homme de bien prend femme dans la maison du méchant, le méchant dans la maison de l’homme de bien. La richesse confond les races. Ne t’étonne donc point, Polypédès, que l’espèce s’altère chez nos concitoyens, puisque le mauvais s’y mêle au bon (183-192).

Voila un homme qui connaît cette femme pour mal née, et ne l’en conduit pas moins dans sa maison, séduit par la richesse qu’elle possède ; il est illustre et s’associe à son ignominie ; car la puissante nécessité l’arme de courage, la nécessité qui donne l’audace à l’esprit de l’homme (193-196).

L’homme qui jouit, par la faveur de Jupiter, de richesses justement acquises, les possède jusqu’au bout sans atteinte. Mais celui qui, dans sa cupidité, s’enrichit par des moyens injustes, ravissant à l’aide de faux serments le bien d’autrui, celui-là paraît gagner d’abord, mais il perd à la fin : la volonté des dieux est plus forte que lui. Ce qui abuse les hommes, c’est que les dieux ne punissent pas sur-le-champ leurs criminelles pratiques. Mais l’un paye lui-même la dette funeste qu’il a contractée envers eux, sans laisser le châtiment suspendu sur la tête de ses enfants ;