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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

dre, parmi vos chansons, cette belle parole : « Ce qui est beau, on l’aime ; ce qui n’est pas beau, on ne peut l’aimer. » Telle fut la parole qui vint sur vos lèvres divines (15-18).

Cyrnus, que ces vers où je vais t’instruire soient marqués d’un sceau, et qu’on ne puisse les dérober sans se trahir. Nul alors n’y changera le bien en mal. Chacun dira : « Ce sont là les vers de Théognis, le poète de Mégare, illustre parmi les hommes. » Non qu’il me soit encore donné de plaire à tous mes concitoyens : qu’y a-t-il là d’étonnant, Polypédès ? Jupiter lui-même, soit qu’il fasse tomber la pluie, soit qu’il la retienne, ne contente pas tous les hommes (19-26).

Je vais, Cyrnus, t’adresser de bienveillants conseils, semblables a ceux que je reçus moi-même, encore enfant, des hommes de bien. Sois sage, et garde-toi de rechercher, par des actes honteux ou injustes, les honneurs, la puissance, la fortune. Voilà ce que tu dois apprendre d’abord. Ne fréquente point les mauvais ; ne t’attache qu’aux bons ; avec eux mange et bois, près d’eux seuls consens à t’asseoir ; cherche à plaire à ceux dont la puissance est grande. Des bons tu n’apprendras rien que de bon ; mais, si tu te mêles aux méchants, tu perdras même ce que tu avais de sens. Instruit par mes leçons, fréquente donc les hommes de bien, et tu diras un jour que je conseille utilement ceux que j’aime (27-38).

Cyrnus, cette ville est en travail ; je crains bien qu’elle n’enfante quelque redresseur de notre insolence. Elle a des citoyens encore retenus et réglés, mais des chefs qui tournent à l’iniquité et sont près d’y tomber (39-42).