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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

de l’épopée ionienne et en fit comme le catéchisme poétique et populaire des Hellènes. Homme de réflexion encore plus que d’inspiration, et préoccupé du présent bien mieux que du passé, ou plutôt mettant le passé au service du présent pour l’instruire et pour l’améliorer, Hésiode n’a pas négligé comme Homère de nous parler de sa personne, des particularités de son temps. Nous savons par lui-même (et non pas seulement, ainsi qu’on l’a prétendu, par quelqu’un de ses premiers disciples, interpolateur de ses ouvrages,) que son père vint de Cyme ou Cume en Éolide chercher en Béotie le bien-être qu’il n’avait pu trouver dans sa patrie asiatique. Il s’établit à Ascra, sur le territoire de Thespies, non loin de l’Hélicon, et ce fut là, selon toute apparence, que naquit Hésiode si souvent nommé le poète d’Ascra. Livré avec les siens aux soins de l’agriculture dans ce canton peu favorisé du ciel, l’introduction de la Théogonie, d’accord avec les Œuvres et Jours, nous le dépeint paissant ses brebis au pied de la montagne, lorsqu’il reçut des Muses la branche de laurier, symbole de sa mission poétique. Plus tard, engagé avec son frère Persès, après la mort de leur père, dans un procès au sujet de leur commun héritage, il le perdit devant ces juges corrompus, devant ces « rois mangeurs de présents », dont il se vengea en flétrissant leurs voies tortueuses, et bien mieux encore, en faisant de ce débat de famille l’occasion de ces exhortations au travail, à l’ordre, à la justice, qui, dans la personne de son frère, s’adressaient à tous ses contemporains, et