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LES TRAVAUX ET LES JOURS

maladies viennent d’elles-mêmes nous visiter et, le jour, la nuit, nous apportent la douleur ; elles viennent en silence, car le prudent Jupiter leur a ôté la voix. (Il n’est donc pas possible de se soustraire aux décrets de Jupiter.)

Maintenant, si tu le veux, je vais te faire rapidement un autre récit, instructif et véridique. C’est à toi de le graver dans ta mémoire. (Apprends comment ont une commune origine les dieux et les mortels.)

En or fut d’abord formée par les immortels, habitants de l’Olympe, la race des hommes à la voix articulée. C’était au temps de Saturne, lorsqu’il régnait encore dans le ciel. Les humains vivaient alors comme les dieux, le cœur libre de soucis, loin du travail et de la douleur. La triste vieillesse ne venait point les visiter, et, conservant durant toute leur vie la vigueur de leurs pieds et de leurs mains, ils goûtaient la joie dans les festins, à l’abri de tous les maux. Ils mouraient comme on s’endort, vaincu par le sommeil. Tous les biens étaient à eux. La campagne fertile leur offrait d’elle-même une abondante nourriture, dont ils jouissaient à leur gré, qu’ils recueillaient paisiblement ensemble, comblés de biens (riches en fruits de toute espèce et chers aux dieux immortels). Mais, quand la terre eût enfermé dans son sein cette première race, le grand Jupiter en fit des génies bienfaisants, qui habitent parmi nous, veillent à la garde des mortels, observent les actions justes et criminelles, environnés de nuages qui les dérobent à nos yeux, errant sur la surface de la terre et y distribuant la richesse. Telle est la royale fonction qu’ils reçurent en partage.

Les habitants des demeures célestes formèrent en-