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Poëmes en prose.

les feuilles du cresson. Il chante : « Blonde fille des chênes, Gaule aux lèvres vermeilles, vierge à qui j’ai donné mon âme, fais dire à ma harpe ce que disent tes grands bois. »

Les bardes marquent la mesure avec leurs mains pour ne pas laisser échapper une faute ; mais les porteurs d’épée sommeillent, et Genièvre pique de la pointe de son couteau la table de sapin. Le Gaulois secoue ses longs cheveux et tire de la harpe un si puissant accord que les guerriers frémissent, comme si la trompette avait retenti.

« Porteurs d’épées, je ne chante pas pour l’oreille, je chante pour le cœur ; éveillez-vous ! »

La voix du barde est plus forte que la voix d’un roi. Il chante : « Le soleil se lève sur la plaine sanglante, les mourants frissonnent, les chevaux blessés hennissent et meurent. L’armée gauloise est vaincue, et les derniers défenseurs d’Alise n’ont pas bu depuis la bataille.