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baston, jamais il ne print plaisir à faire combattre à l’escrime des poings, ny à l’austre escrime où les combattants s’aydent de tout ce qu’ils peuvent.

Il receuillit une fois des ambassadeurs du roy de Perse pendant que son pere estoit alle en quelque voyage hors de son royaulme, et se rendant privé avecques eulx les guaigna tellement par la courtoisie dont il leur usa, et la bonne chere qu’il leur feit, et parce qu’il ne leur demandoit rien de puerile ny de petit, ains les interrogeoit des distances qu’il y avoit d’un lieu à austre, et de la maniere comment on alloit sur les champs es haultes provinces de l’Asie, et du roy mesme de Perse, comme il se desportoit envers ses ennemys, et quelles forces et puissances il avoit, qu’ils en demourerent grandement satisfaicts et plus encores esmerveillez : de maniere qu’ils n’estimerent plus l’eloquence et la vivacité d’esprit de Philippus, dont on faisoit tant de compte, à comparaison de l’instinct à toutes haultes entreprinses, et de grands faicts que promettoit le naturel de son fils.

Au moyen de quoy toutes les fois qu’il venoit nouvelles que son pere avoit prins auscune ville de renom, ou guaigné quelque grosse bataille, il n’estoit point fort joyeux de l’entendre, ains disoit à ses esgaulx en aage, mon pere prendra tout, enfants, et ne me laissera rien de beau ny de magnificque à faire et à conquerir avecques vous. Car n’aymant point la volupté,