Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sénateurs ; Lucius Gellius, qui était fort vieux, déclara que le partage n’aurait point lieu tant qu’il serait en vie. « Attendons, dit Cicéron ; car Gellius ne demande pas un long délai. » Un certain Octavius, à qui l’on reprochait son origine africaine, dit un jour à Cicéron qu’il ne l’entendait pas. « Ce n’est pas, lui répondit Cicéron, que tu n’aies l’oreille ouverte[1]. » — « Tu as fait périr plus de citoyens, lui disait Métellus Népos, en rendant témoignage contre eux, que tu n’en as sauvé par ton éloquence. — Je conviens, repartit Cicéron, que j’ai encore plus de créance auprès des autres que de talent pour la parole. » Un jeune homme, accusé d’avoir empoisonné son père dans un gâteau, s’emportait contre Cicéron, et le menaçait de l’accabler d’injures. « Je crains moins tes injures que ton gâteau, » répondit Cicéron. Publius Sestius, dans une affaire criminelle qu’il avait, pria Cicéron et quelques autres orateurs de le défendre[2] ; mais il voulait toujours parler, et ne laissait pas dire un mot à ses défenseurs. Comme les juges étaient aux opinions, et qu’elles paraissaient favorables à l’accusé : « Profite du temps, Sestius, dit Cicéron ; car demain tu seras un homme privé. » Publius Cotta, qui se donnait pour un jurisconsulte, quoiqu’il fût sans connaissances et sans esprit, appelé un jour en témoignage par Cicéron, répondit qu’il ne savait rien. « Tu crois peut-être, dit Cicéron, que je t’interroge sur le droit. » Métellus Népos disputant contre lui, et lui répétant à plusieurs reprises : « Cicéron, quel est ton père ? — Grâce à ta mère, dit Cicéron, tu serais plus embarrassé que moi pour répondre à une pareille question. » Or, la mère de Népos n’avait

  1. Allusion à la coutume des peuples que les Grecs et les Romains appelaient Barbares, de se percer les deux oreilles.
  2. Nous avons encore le discours de Cicéron pour P. Sextius, ou Sestius.