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cinquante mille drachmes[1], pour le donner à la fille de Vinnius.

Depuis ce moment, les choses mêmes qui furent faites avec modération par l’empereur furent calomniées ; comme par exemple la décharge d’impôts et le droit de cité accordés aux Gaulois qui avaient pris part à la révolte de Vindex : on crut qu’ils n’avaient point obtenu ces faveurs de l’humanité de l’empereur, mais qu’ils les avaient achetées de Vinnius. Voilà pourquoi le peuple haïssait la domination de Galba. Quant aux soldats, quoiqu’ils n’eussent point reçu la gratification qui leur avait été promise, ils s’étaient pourtant flattés, au commencement de son règne, de tirer de lui autant que de Néron. Mais Galba, informé de leurs plaintes, dit qu’il avait coutume de choisir ses soldats, et non de les acheter : parole digne d’un grand prince, mais qui fit naître dans le cœur des soldats une haine implacable contre lui. En effet, il semblait que Galba non-seulement les frustrât de ce qu’il leur devait, mais qu’il donnât encore l’exemple à ses successeurs d’en faire autant que lui.

Cependant à Rome les mouvements de révolte fermentaient encore sourdement parmi les troupes ; mais le respect qu’elles avaient pour la présence de l’empereur contenait ce désir de nouveautés ; et, comme elles ne voyaient aucune occasion de changement, elles comprimaient leur haine et la tenaient cachée. Les légions qui avaient servi sous Verginius, et qui étaient alors sous les ordres de Flaccus, en Germanie, fières de la victoire qu’elles avaient remportée sur Vindex, et voyant qu’elles n’en obtenaient aucune récompense, étaient sourdes aux discours de leurs officiers, et ne tenaient aucun compte de leur général, que la goutte, dont il était continuellement tourmenté, avait rendu presque impotent,

  1. Environ cent trente-cinq mille francs.