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plus profond mépris pour les Achéens, à cause de leur lâcheté. Et en effet, ce peuple, accoutumé à se défendre par des mains étrangères, et à se mettre à l’abri sous les armes des Macédoniens, était plongé dans l’oisiveté et l’inaction. Les Étoliens songeaient donc à s’emparer du Péloponnèse : ils y entrèrent en armes, prirent chemin faisant quelque butin sur les terres de Patras et de Dymé[1] ; puis, ils se jetèrent sur le territoire de Messène, et y mirent tout à feu et à sang. Aratus, indigné de ces violences, et qui voyait que Timoxénus, qui était général cette année-là, différait de jour en jour d’aller à l’ennemi, et ne cherchait qu’à gagner du temps, parce que son commandement allait expirer ; Aratus, dis-je, qui lui devait succéder, avança de cinq jours son entrée en charge, pour aller au secours des Messéniens. Il assembla sur-le-champ les Achéens ; mais, comme ils avaient cessé de s’exercer au métier des armes, et qu’ils étaient peu disposés à combattre, il fut défait près de Caphyes[2]. Aratus sembla, dans cette occasion, avoir agi avec trop d’ardeur ; mais il se refroidit si fort dans la suite, et perdit tellement toute espérance, que, loin de profiter des avantages que les Étoliens lui donnèrent différentes fois sur eux, il leur laissa exercer, dans le Péloponnèse, toute leur insolence, et souffrit qu’ils y vécussent sous ses yeux mêmes avec une licence désordonnée.

Les Achéens se virent donc contraints une seconde fois de tendre les mains vers la Macédoine, et d’appeler Philippe, pour lui confier les affaires de la Grèce, espérant que l’affection qu’il portait à Aratus, et la confiance qu’il avait en lui, le rendraient doux et traitable, et qu’ils le manieraient à leur gré. Mais Philippe, dès son arrivée, prêta l’oreille aux calomnies qu’Apellès, Mégaléus et

  1. Patras et Dymé étaient deux villes l’Achaïe.
  2. Ville d’Arcadie.