Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/603

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

val avant de le monter. Il ne consentit à devenir chef des Achéens, qui l’en sollicitaient par des ambassades et par des décrets, et qui se soumettaient à sa puissance, qu’après les avoir en quelque sorte bridés et par la garnison qu’il mit dans la citadelle, et par les otages qu’il exigea. À la vérité, Aratus se récrie fort contre le reproche qu’on lui fait, et se justifie sur la nécessité ; mais Polybe rapporte[1]) que, longtemps avant qu’il y fût forcé, se défiant de l’audace de Cléomène, il s’était abouché secrètement avec Antigonus, et avait engagé les Mégalopolitains à demander aux Achéens Antigonus pour chef de la ligue, parce que c’étaient les Mégalopolitains qui avaient le plus à souffrir de la guerre, par les courses et les pillages que Cléomène faisait sur leurs terres. Phylarque a écrit la même chose ; mais il ne faudrait pas trop s’en rapporter à cet historien, si son récit n’était appuyé du témoignage de Polybe ; car, toutes les fois qu’il parle de Cléomène, il est comme saisi d’une sorte d’enthousiasme, qui naît de l’affection qu’il lui porte, et il fait de son histoire un véritable plaidoyer, dans lequel il s’applique à charger toujours Aratus, pour justifier le Spartiate.

Cléomène enleva donc une seconde fois Mantinée aux Achéens, et les défit ensuite dans une grande bataille près d’Hécatombéon. Ils furent si consternés de cet échec, qu’ils lui envoyèrent sur-le-champ des députés, pour le prier de venir à Argos prendre le commandement des troupes. Aratus ne fut pas plutôt informé que Cléomène arrivait, et qu’il était déjà près de Lerne avec son armée, qu’effrayé de sa venue, il s’empressa de députer auprès de lui, pour le prier de n’amener avec lui que trois cents hommes, comme s’il venait vers des amis et des alliés ; ou, s’il se défiait des Achéens, d’accepter des otages.

  1. Dans le deuxième livre de son Histoire.