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le conduisit aux Achéens. Ce fut dans cette occasion surtout que le conseil des Achéens fit paraître la confiance et l’affection qu’ils avaient pour Aratus ; car Aratus, piqué contre Lysiadès, s’étant opposé à ce qu’Aristomachus fût reçu, ils le renvoyèrent sur-le-champ. Et depuis, Aratus, qui avait changé de disposition, ayant parlé dans le conseil en faveur d’Aristomachus, ils s’empressèrent de faire avec joie tout ce qu’il voulut : ils portèrent le décret qui associait les Argiens et les Phliasiens à la ligue ; et, l’année suivante, Aristomachus fut nommé général. Aristomachus, se voyant en crédit auprès des Achéens, et voulant entrer en armes dans la Laconie, appela Aratus, qui était alors à Athènes, afin qu’il vînt partager avec lui cette expédition. Aratus lui écrivit pour le détourner de cette entreprise ; il ne voulait point que les Achéens s’attaquassent à Cléomène, prince fier et audacieux, et qui trouvait dans les dangers mêmes un accroissement de puissance. Mais Aristomachus s’obstina : Aratus obéit, et se rendit à l’armée. Cléomène s’étant présenté tout à coup devant eux avec son armée en bataille, près de Pallantium, Aristomachus voulut accepter le combat : Aratus s’y opposa, ce qui le fit accuser par Lysiadès auprès des Achéens. L’année suivante, Lysiadès brigua le commandement militaire en concurrence avec Aratus, et intrigua fortement pour l’obtenir ; mais Aratus eut la pluralité des suffrages, et fut nommé général pour la douzième fois.

Pendant l’exercice de sa charge, il fut défait par Cléomène, près du mont Lycée ; et, ayant pris la fuite, il s’égara la nuit, et passa pour mort. C’était la seconde fois que le bruit de sa mort se répandait dans la Grèce. Toutefois il se sauva ; et, ayant rassemblé les débris de son armée, il voulut, non point se retirer en sûreté, mais profiter adroitement de l’occasion : alors, sans que personne s’y attendit, ni qu’on en pût même concevoir la pensée,