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à travers la plaine de Thriasie[1] ; il se cassa la jambe : le traitement auquel il dut se soumettre ayant exigé plusieurs incisions, il fallut pendant longtemps qu’il se fit porter en litière dans les expéditions qu’il commandait.

Antigonus était mort, et son fils Démétrius lui avait succédé. Aratus n’en poursuivait que plus vivement encore la délivrance d’Athènes, et n’en avait que plus de mépris pour les Macédoniens. Aussi, ayant été défait près de Phylacie[2] par Bithys, lieutenant de Démétrius, et le bruit s’étant répandu qu’il avait été fait prisonnier, et même qu’il avait été tué, Diogénès, qui commandait le Pirée, écrivit à Corinthe une lettre, par laquelle il ordonnait aux Achéens de sortir de la ville, vu qu’Aratus était mort. Quand cette lettre fut portée à Corinthe, le hasard voulut qu’Aratus s’y trouvât : de sorte que les envoyés de Diogénès, après avoir servi de jouet aux Corinthiens, s’en retournèrent tout confus. Le roi de Macédoine avait de son côté fait partir de ses ports un vaisseau, avec ordre de lui amener Aratus chargé de fers. Les Athéniens, dans cette occasion, surpassèrent tout ce que la flatterie la plus outrée pouvait imaginer, pour complaire aux Macédoniens ; jusque-là qu’ils se couronnèrent de fleurs à la première nouvelle de la mort d’Aratus. Aratus, irrité d’une pareille conduite, marcha incontinent contre eux, et s’avança jusqu’à l’Académie ; mais, fléchi par leur soumission, il ne leur fit aucun mal. Dans la suite, les Athéniens, reconnaissant sa vertu, et qui voulaient, après la mort de Démétrius, recouvrer leur liberté, l’appelèrent dans leur ville. Alors Aratus, quoiqu’il y eût cette année-là un autre général des Achéens, et qu’une longue maladie l’obligeât lui-même à garder le lit, se fit porter dans une litière jusqu’à

  1. C’était un dôme de l’Attique à peu de distance d’Éleusis.
  2. Ville de Thessalie.