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à qui il donne Timonidès pour commandant ; et, montant incontinent à cheval, il court par toute la ville, et arrête les fuyards ; puis, prenant avec lui les soldats étrangers qui gardaient l’Achradine, il les mène frais et pleins d’ardeur contre les Barbares déjà fatigués, et rebutés de l’essai qu’ils viennent de faire. Ils s’étaient flattés qu’au premier choc ils emporteraient la ville d’emblée ; mais, lorsqu’ils virent, contre leur attente, qu’ils avaient affaire à des hommes aguerris et pleins de vigueur, ils commencèrent à reculer vers la citadelle. Les Grecs ne les voient pas plutôt plier, qu’ils tombent sur eux avec plus de roideur encore, les mettent en fuite, et les obligent de se renfermer dans leurs murailles. Les Barbares ne tuèrent à Dion que soixante-quatorze hommes, tandis qu’ils perdirent un grand nombre des leurs.

Les Syracusains, pour récompenser les soldats d’une victoire si brillante, leur distribuèrent cent mines[1] à chacun ; et les soldats décernèrent à Dion une couronne d’or. Cependant il vint de la part de Denys des hérauts qui apportaient à Dion des lettres des femmes du palais. Il y en avait une entre autres qui portait cette adresse : À mon père, et qu’on jugea être d’Hipparinus. C’était le nom du fils de Dion, quoique Timée prétende qu’il s’appelait Arétéus, du nom de sa mère Arété ; mais je crois que, sur ce point, on doit plutôt s’en rapporter à Timonidès, qui était ami et compagnon d’armes de Dion. Toutes les autres lettres furent lues en présence des Syracusains : elles ne contenaient que des prières et des supplications de la part des femmes. Mais, quand vint le tour de celle qu’on supposait être d’Hipparinus, les Syracusains voulurent s’opposer à ce qu’elle fût décachetée et lue publiquement ; toutefois Dion s’obstina à l’ouvrir : elle était de Denys ; et, quoique adressée à Dion, elle

  1. Environ neuf mille francs de notre monnaie.