Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/421

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ils dirent qu’elle annonçait que la situation triste et pénible des Syracusains allait éprouver un heureux changement. Ils déclarèrent enfin, sur le premier prodige, que, l’aigle étant le ministre de Jupiter et la pique le symbole de la domination et de la puissance, c’était un signe que le maître des dieux méditait la ruine et la destruction de la tyrannie. Voilà ce que rapporte Théopompe.

Les soldats de Dion s’embarquèrent sur deux vaisseaux ronds[1], suivis de deux vaisseaux de médiocre grandeur et de deux galères à trente rames. Outre les armes qu’avaient les soldats, Dion menait encore avec lui deux mille boucliers, et une grande quantité de traits et de piques ; il avait aussi fait d’abondantes provisions de vivres, afin qu’ils ne manquassent de rien pendant la traversée ; car ils devaient être, durant tout le cours de la navigation, à la merci des vents et des flots, parce qu’ils craignaient d’approcher de la terre, sachant que Philistus était à l’ancre sur les côtes de l’Iapygie, pour les attaquer au passage. Après douze jours de navigation par un vent doux et frais, ils arrivèrent le treizième au cap Pachynum, en Sicile[2]. Là, le pilote leur conseilla de débarquer promptement, s’ils ne voulaient pas s’exposer, en s’éloignant des côtes et en abandonnant le cap, à être ballottés en pleine mer pendant plusieurs jours et plusieurs nuits, pour attendre le vent du midi, dans la saison de l’été où l’on était alors. Mais Dion, qui craignait de faire sa descente si près des ennemis, et qui aimait mieux, aborder plus loin, doubla le cap Pachynum. Au même instant le vent du nord, s’élevant avec violence, et soulevant les flots, éloigna les vaisseaux de

  1. On appelait ainsi les vaisseaux qui servaient aux transports, par opposition aux vaisseaux de guerre, qui étaient beaucoup plus longs.
  2. Au sud-ouest de l’île.