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charbon ardent, lui brûlait la chevelure à l’entour. Ni son frère ni son fils n’étaient admis dans son appartement avec les vêtements qu’ils portaient en s’y présentant : il fallait, avant d’entrer, que chacun d’eux quittât sa robe, et en prît une autre, après avoir été visité par les gardes. Un jour, son frère Leptinès, voulant lui faire le tableau d’une terre, prit la pique d’un des gardes, pour en tracer le plan sur le sable. Denys entra contre lui dans une violente colère, et fit mourir le garde qui avait donné sa pique. Il suspectait jusqu’à ses amis, parce que, disait-il, les connaissant hommes de sens, il savait bien qu’ils aimeraient mieux être tyrans eux-mêmes que d’obéir à un tyran. Il tua Marsyas, un de ses officiers, à qui il avait donné un commandement dans ses armées, uniquement à cause qu’il avait rêvé que cet officier regorgeait ; prétendant qu’il n’avait en ce songe pendant la nuit, que parce que Marsyas avait formé le complot dans la journée, et l’avait communiqué à d’autres. Cependant cet homme si timide, si lâche, et dont l’âme était remplie de tant d’indignes faiblesses, s’emportait contre Platon, parce qu’il ne voulait pas le déclarer le plus courageux des hommes.

Dion donc, comme je viens de le dire, voyant le jeune Denys mutilé, si j’ose ainsi parler, par son ignorance, et de mœurs si dépravées, l’exhortait sans cesse à se tourner vers l’étude : il le pressait d’écrire au premier des philosophes, d’employer auprès de lui les plus vives instances pour l’attirer en Sicile, et, quand il y serait venu, de s’abandonner entièrement à lui, afin que Platon, par ses discours, corrigeât ses mœurs et les dirigeât vers le bien ; et que, formé sur le modèle de l’être divin, le plus