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particulier pour Philostrate, le plus habile des philosophes de son temps à parler en improvisant, mais qui se disait faussement disciple de l’Académie. César, qui détestait les mœurs de cet homme, rejetait toutes les prières d’Arius ; mais Philostrate, couvert d’un manteau noir, et laissant croître à dessein sa barbe blanche, suivait Arius partout, lui répétant sans cesse ce vers :

Les sages, s’ils sont vraiment sages, sauvent les sages[1].


Ce qu’entendant César, et voulant plutôt mettre Arius à l’abri de l’envie, que délivrer Philostrate de ses craintes, il lui accorda sa grâce.

Quant aux enfants d’Antoine, Antyllus, son fils aîné, qu’il avait eu de Fulvie, fut livré par Théodore, son précepteur, et mis à mort. Les soldats lui ayant coupé la tête, le précepteur s’empara d’une pierre de grand prix que le jeune homme portait au cou, et la cousit à sa ceinture. Il niait le fait ; mais, comme on eut trouvé la pierre sur lui, il fut mis en croix. César plaça sous bonne garde les enfants de Cléopâtre avec leurs gouverneurs, et fournit honorablement à leur entretien. Pour Césarion, qu’on disait fils de César, sa mère l’avait envoyé en Éthiopie avec de grandes richesses, et de là dans l’Inde. Mais Rhodon, son précepteur, digne émule de Théodore, lui persuada de retourner à Alexandrie, où César le rappelait, disait-il, pour lui donner le royaume d’Égypte. César délibérait sur ce qu’il devait faire du jeune homme ; et l’on prétend qu’Arius lui dit :

Il n’est pas bon qu’il y ait plusieurs Césars[2].


Et César le fit mourir peu de temps après la mort de Cléopâtre.

  1. On ne sait pas d’où est tiré ce vers ; c’est peut-être l’œuvre de Philostrate lui-même.
  2. Parodie du vers si connu d’Homère, Iliade, ii, 204.