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et, suivi de deux officiers qui étaient montés avec lui, il descendit à la porte où Cléopâtre se tenait, tout attentive à ce que lui disait Gallus. Une des femmes qui étaient enfermées avec elle, les apercevant, s’écria : « Infortunée Cléopâtre, te voilà prise vivante ! » À ces mots, la reine se retourne, et voit Proculéius : elle veut se frapper d’un poignard qu’elle portait toujours à sa ceinture ; mais Proculéius court à elle, et la prend entre ses bras. « Cléopâtre, lui dit-il, tu te fais tort à toi-même et tu es injuste envers César, en voulant lui ôter la plus belle occasion de faire éclater sa douceur, et en donnant lieu de calomnier le plus clément des chefs d’empire, comme si c’était un homme sans pitié et implacable dans son ressentiment. » En disant ces mots, il lui ôte le poignard de la main, et secoue sa robe, pour s’assurer qu’elle n’y cachait pas quelque poison. César envoya ensuite auprès d’elle Épaphroditus, un de ses affranchis, avec ordre de la garder avec soin et de veiller à ce qu’elle n’attentât point à ses jours, mais de lui accorder d’ailleurs tout ce qu’elle pourrait désirer.

Quant à César lui-même, il entra dans Alexandrie en s’entretenant avec le philosophe Arius, qu’il tenait par la main, afin que les concitoyens d’Arius, voyant cette distinction singulière, fissent à celui-ci plus d’honneur et le respectassent davantage. Il se rendit au gymnase, et monta sur un tribunal qu’on avait dressé pour lui. Là, tout le peuple d’Alexandrie, saisi de frayeur, se jeta à ses pieds ; mais César les fit lever. « Je pardonne, dit-il, aux Alexandrins toutes les fautes qu’ils ont commises : premièrement, par respect pour Alexandre, le fondateur de leur ville ; en second lieu, par admiration pour la grandeur et la beauté de la ville ; troisièmement enfin, pour faire plaisir au philosophe Arius, mon ami. » Tel fut le témoignage honorable qu’Arius reçut de César. Il demanda grâce à César pour plusieurs citoyens de la ville, en