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exil, qu’il passa tantôt à Égine, tantôt à Trézène : il ne portait jamais les yeux sur l’Attique sans verser des larmes ; et l’on rapporte des mots de lui qui n’annonçaient aucun courage, et qui répondaient mal à son énergie politique d’autrefois. En sortant d’Athènes il avait, dit-on, levé les mains vers l’acropole ; et, s’adressant à Minerve : « Protectrice de notre ville, s’était-il écrié, comment peux-tu prendre intérêt à ces trois bêtes farouches, la chouette, le dragon et le peuple ? » Tous les jeunes gens qui venaient le voir et s’entretenir avec lui, il les détournait de s’entremettre du gouvernement. « Si dès le commencement, disait-il, on m’eût présenté deux chemins, celui de la tribune et des assemblées, ou celui d’une mort certaine, et que j’eusse pu prévoir tous les maux qui m’attendaient dans la carrière politique, les craintes, les jalousies, les calomnies, les luttes qui en sont inséparables, je me serais jeté tête baissée dans le chemin de la mort. »

Il était encore dans son exil lorsque Alexandre mourut. La Grèce se ligue de nouveau ; Léosthène se signale par sa valeur, assiège Antipater dans Lamia, et l’enferme d’un mur de circonvallation[1]. L’orateur Pythéas et Callimédon Carabus, tous deux bannis d’Athènes, se rangèrent du parti d’Antipater : ils parcouraient les villes avec les amis et les ambassadeurs d’Antipater, et empêchaient les Grecs de quitter son alliance pour s’attacher aux Athéniens. Mais Démosthène se réunit aux ambassadeurs d’Athènes, et seconda leurs efforts de tout son pouvoir, en persuadant aux Grecs de tomber sur les Macédoniens, et de les chasser de la Grèce. En Arcadie, au rapport de Phylarque, Pythéas et Démosthène eurent ensemble une très-vive querelle. Ils parlaient, dans l’assemblée, l’un pour les Macédoniens, et l’autre pour les

  1. Voyez la Vie de Phocion dans le troisième volume.