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d’échapper de ses mains à quelque prix que ce fût. Le Parthe lui fit réponse que, quant à cette restitution, il n’en fallait plus parler ; mais que, s’il voulait se retirer sans délai, il lui promettait la paix et une entière sûreté pour sa retraite. Antoine accepta ces conditions ; et, peu de jours après, il fit charger ses bagages, et se mit en marche. Il avait plus que personne le talent nécessaire pour parler à une grande multitude, et était plus propre qu’aucun autre à conduire une armée par l’ascendant de ses discours ; mais, en cette occasion, la honte et l’abattement ne lui permirent pas de se faire entendre aux troupes pour les encourager : il chargea de ce soin Domitius Énobarbus. Il y en eut plusieurs qui prirent ce silence pour du mépris et s’en offensèrent ; mais la plupart en pénétrèrent la cause, et furent touchés de sa peine : aussi jugèrent-ils qu’ils devaient témoigner à Antoine plus de respect et d’obéissance encore qu’auparavant.

Comme il se disposait à reprendre le chemin par où il était venu, qui était une plaine découverte et sans arbres, un homme du pays des Mardes, qui avait une longue expérience des mœurs des Parthes, et qui, dans le combat où Antoine perdit ses machines, avait donné aux Romains des preuves de sa fidélité, vint le trouver, et lui conseilla de faire sa retraite par la droite, afin de gagner les montagnes, plutôt que d’engager des troupes pesamment armées et chargées de bagages dans des plaines nues et découvertes, où elles seraient exposées à la cavalerie et aux flèches des Parthes. « C’est uniquement dans cette espérance, ajouta-t-il, que Phraate t’a accordé des conditions si favorables, pour t’engager à lever le siège ; mais, si tu veux, je serai ton guide : je te conduirai par un chemin plus court, et où tu trouveras en abondance toutes les choses nécessaires. »

Antoine, à ce discours, délibéra sur le parti qu’il devait prendre : il ne voulait pas, après le traité qu’il