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vaux des Parthes, effrayés de ce bruit, se cabrèrent, et les cavaliers eux-mêmes, sans attendre qu’on en vînt aux mains, prirent ouvertement la fuite. Antoine s’attacha vivement à leur poursuite, dans l’espérance que ce seul combat terminerait la guerre, ou du moins en avancerait la fin. Mais, après que l’infanterie eut poursuivi les ennemis environ cinquante stades[1], et la cavalerie trois fois autant, les Romains, comptant le nombre de ceux qui avaient été tués à la bataille et de ceux qui avaient été pris, ne trouvèrent que trente prisonniers et quatre-vingt morts. Ce fut alors un découragement et un désespoir général, quand ils vinrent à considérer le peu de monde qu’ils avaient tué dans leur victoire, tandis que, dans leur défaite à la prise des batteries, ils avaient perdu tant de soldats. Le lendemain ils plièrent bagage, et reprirent le chemin de Phraata et du camp. Ils rencontrèrent d’abord, dans leur marche, un corps d’ennemis peu considérable, puis un plus grand nombre, et enfin l’armée entière, qui, comme des troupes fraîches et qui n’eussent point été mises en déroute, les harcelaient de tous côtés et les défiaient au combat : ce qui rendit le retour des Romains à leur camp plein de difficultés et de travail.

Cependant les Mèdes qui étaient assiégés firent une sortie contre ceux qui gardaient la levée, et leur causèrent tant d’effroi qu’ils les mirent en fuite. Antoine, irrité de la lâcheté de ses troupes, employa, pour les punir, l’ancien châtiment de la décimation : il les partagea par dizaines, puis il fit mourir de chacune de ces dizaines celui que le sort avait désigné, et fit donner pour nourriture à ceux qui restaient de l’orge au lieu de froment. Cette guerre, déjà si fâcheuse pour les deux partis, leur faisait envisager un avenir plus terrible encore. Antoine se voyait menacé d’une prochaine disette ; car il ne pouvait

  1. Environ deux |ieues et demie.