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relâche. Le jeune Antigonus, affligé de voir sacrifier ainsi tant et de si braves soldats, dit un jour à Démétrius : « Mon père, pourquoi laissons-nous périr sans nécessité tant de braves gens ? — Mais toi, répondit Démétrius en colère, de quoi te fâches-tu ? dois-tu la nourriture aux morts ? » Il voulut montrer qu’il n’exposait pas ses compagnons seulement, mais qu’il partageait avec eux les dangers : il fut atteint d’un javelot, qui lui perça le cou. Cette blessure, quoique considérable, ne lui fit point suspendre le siège ; et il se rendit maître de Thèbes pour la seconde fois. Il fit son entrée dans la ville avec un air si terrible, qu’il glaça de terreur les habitants, qui ne doutèrent pas d’éprouver de sa part les plus rigoureux châtiments ; mais il se contenta d’en faire mourir treize, en bannit quelques autres, et fit grâce à tout le reste. Ainsi Thèbes, qui n’était rebâtie que depuis dix ans, fut prise deux fois dans ce court espace.

Vers ce temps-là arriva la célébration des jeux pythiques ; et Démétrius fit, à cette occasion, une nouveauté jusqu’alors sans exemple. Comme les Étoliens occupaient les défilés de Delphes, il tint l’assemblée générale des Grecs à Athènes, et y fit célébrer les jeux, disant qu’il était convenable que le dieu fût honoré dans la ville dont il était le patron, et qui tirait de lui son origine. Les jeux terminés, il retourna en Macédoine ; mais, naturellement ennemi du repos, et voyant d’ailleurs que les Macédoniens, fort obéissants pendant la guerre, étaient inquiets et séditieux durant la paix, il les mena contre les Étoliens. Après avoir ravagé leur pays, il y laissa Pantauchus avec une bonne partie de son armée, et marcha avec le reste contre Pyrrhus. Pyrrhus, de son côté, venait à sa rencontre ; mais ils se manquèrent en chemin : Démétrius ravagea l’Épire, et Pyrrhus, tombant sur Pantauchus, lui livra bataille. Dans l’action, ils en vinrent à un combat singulier, où ils se blessèrent mutuellement ;