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mone. Archidamus vint à sa rencontre jusqu’à Mantinée ; Démétrius le défit dans un grand combat ; et, l’ayant mis en fuite, il entra dans la Laconie, et donna, sous les murs mêmes de Sparte, une seconde bataille, où il fit cinq cents prisonniers et tua deux cents hommes. Rien, ce semble, ne pouvait l’empêcher de se rendre maître de la ville, qui jusque-là n’avait jamais été prise ; mais aucun roi n’éprouva, autant que Démétrius, de grandes et subites vicissitudes ; surtout dans cette circonstance, où sa fortune paraissait tantôt tomber, tantôt se relever, briller, puis s’obscurcir, s’affaiblir et ensuite reprendre des forces. Aussi, dit-on que, dans ses plus terribles revers, il adressait à la Fortune ce vers d’Eschyle[1] :

C’est toi qui m’as fait grandir, c’est toi qui vas faire ma ruine.

Et en effet, lorsque tout paraissait se disposer pour le rétablir dans ses États et lui rendre son ancienne puissance, il apprit que Lysimachus lui avait enlevé les villes d’Asie, et que Ptolémée s’était rendu maître de Cypre, excepté la seule ville de Salamine, dans laquelle ses enfants et sa mère étaient assiégés. Cependant la Fortune, semblable à cette femme dont parle Archiloque, laquelle,

Méditait des ruses, tenant l’eau d’une main, de l’autre le feu,

après l’avoir rappelé de devant Lacédémone par des nouvelles si fâcheuses et si inquiétantes, ne tarda pas à faire luire à ses yeux, dans des événements nouveaux, de brillantes espérances. Voici à quelle occasion.

Cassandre mort, Philippe, l’aîné de ses fils, lui succéda ; mais il régna peu de temps sur la Macédoine, car il mourut bientôt après son père. Ses deux frères entrèrent en différend : l’un d’eux, Antipater, ayant tué sa

  1. Dans une de ses pièces aujourd’hui perdue.