Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/266

Cette page a été validée par deux contributeurs.

s’en retourna à Antioche dans le plus magnifique appareil. Démétrius s’empara aussitôt de la Cilicie ; et, afin de détruire les accusations de Plistarchus, il envoya sa femme Phila auprès de Cassandre, qui était son frère. Sur ces entrefaites, Déidamie, qui était venue de Grèce trouver Démétrius, mourut de maladie. Démétrius se réconcilia avec Ptolémée par le moyen de Séleucus ; et il fut convenu qu’il épouserait Ptolémais, fille de Ptolémée. Jusque-là Séleucus s’était conduit honnêtement avec Démétrius ; mais bientôt il lui redemanda la Cilicie, moyennant une certaine somme d’argent ; et, comme Démétrius s’y refusa, il revendiqua tout en colère Tyr et Sidon. Ce procédé parut injuste et violent, en ce que Séleucus, qui tenait sous sa domination toutes les provinces qui s’étendent depuis les Indes jusqu’à la mer de Syrie, se trouvait encore si pauvre, que, pour l’acquisition de deux villes, il rompait avec son beau-père, avec un homme qui venait d’éprouver un si grand revers de fortune, attestant par là la vérité de ce que dit Platon : Que celui qui veut être vraiment riche doit non point augmenter son bien, mais diminuer sa cupidité ; parce que celui qui ne met pas de bornes à son avarice est toujours dans la pauvreté et dans le besoin.

Démétrius ne s’effraya point des menaces de son gendre. « Quand même j’aurais perdu dix mille autres batailles comme celle d’Ipsus[1], dit-il, je n’achèterais pas l’amitié de Séleucus. » Il mit des garnisons dans les deux villes ; et, ayant appris que Lacharès, à la faveur d’une sédition qui divisait les Athéniens, s’était emparé d’Athènes, et y régnait en tyran, il espéra qu’en s’y présentant à l’improviste, il pourrait facilement s’en rendre maître. Il repassa donc la mer sans encombre avec une flotte nombreuse ;

  1. Le texte est corrompu à cet endroit ; je suis la correction de Dacier qui est d’ailleurs appuyée par plusieurs manuscrits.