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Cléarque, Macédoniens, et, avec eux, deux Thessaliens, Daochus et Thrasydéus, pour répondre aux allégations des ambassadeurs athéniens. Les Thébains ne se dissimulaient pas ce qui leur était le plus utile : ils avaient toujours sous les yeux les maux que leur avait causés la guerre phocique, et dont les plaies étaient encore saignantes. Mais la véhémence de l’Orateur ranima, comme dit Théopompe, le feu de leurs cœurs, enflamma leur ambition, et les aveugla sur toutes les suites de leurs démarches : ils bannissent toute crainte, toute prudence, toute reconnaissance même ; ils se laissent entraîner d’enthousiasme, par l’éloquence de Démosthène, au parti le plus honnête.

Ce succès de l’orateur parut si grand, si éclatant, que Philippe s’empressa d’envoyer des ambassadeurs pour demander la paix ; que la Grèce tout entière se dressa sur pied, dans l’attente de l’avenir ; que, non-seulement les généraux athéniens se conformaient aux ordres de Démosthène, mais encore les Béotarques eux-mêmes : Démosthène était à Thèbes, non moins qu’à Athènes, l’âme de toutes les assemblées ; chez l’un comme chez l’autre peuple, il était également chéri, également puissant : et, comme le remarque Théopompe, ce n’était pas sans un juste motif, ni par un simple caprice, car il avait tout droit à cet amour. Mais une divinité fatale, arbitre des révolutions, qui avait marqué, ce semble, pour cette époque, le terme de la liberté de la Grèce, fit avorter des entreprises si bien concertées, et annonça, par plusieurs signes, les événements qui devaient suivre. Ainsi la Pythie prononçait des oracles effrayants ; et l’on chantait une ancienne prophétie, tirée des recueils sibyllins :

Puissé-je être loin du combat qui se livrera sur les bords du Thermodon !