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ment, promettant en outre que son père leur enverrait cent cinquante mille médimnes de blé, et le bois nécessaire pour la construction de cent trirèmes. C’est ainsi que les Athéniens recouvrèrent la démocratie, quinze ans après l’avoir perdue. Le temps qui s’était écoulé depuis la guerre Lamiaque et la bataille de Cranon[1], ils l’avaient passé dans l’oligarchie en apparence, mais en réalité sous une domination véritablement monarchique, à cause de la grande puissance de Démétrius de Phalère. Toutefois, ils rendirent Démétrius, qui s’était montré si grand, si illustre par ses bienfaits, odieux et insupportable par les honneurs excessifs qu’ils lui décernèrent. Ils leur donnèrent d’abord, à lui et à son père Antigonus, le titre de rois, titre que ni l’un ni l’autre n’avait jamais osé prendre, et qui, réservé jusqu’alors aux seuls descendants de Philippe et d’Alexandre, n’avait encore été conféré à aucun de leurs successeurs. Ils furent aussi les seuls qui les honorèrent du titre de dieux sauveurs. Ils abolirent l’ancienne dignité de leur archonte éponyme, et créèrent à la place un prêtre des dieux sauveurs, qu’ils devaient élire chaque année, et dont le nom serait mis en tête de tous les décrets et de tous les actes publics. Ils décrétèrent en outre que les portraits des deux rois seraient brodés, parmi ceux des autres dieux, sur le voile de Minerve. Ils consacrèrent le lieu où Démétrius était descendu de son char, et y élevèrent un autel, qu’ils appelèrent l’Autel de Démétrius descendant du Char. Ils ajoutèrent deux nouvelles tribus aux anciennes, l’une sous le nom de Démétriade, l’autre sous celui d’Antigonide ; et le Sénat des cinq cents fut porté à six cents, parce qu’il devait y avoir cinquante sénateurs de chaque tribu.

Mais le trait de flatterie le plus outré, ce fut celui

  1. Voyez la Vie de Phocion dans le troisième volume, et celle de Démosthène dans le quatrième.