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employait le reste aux besoins des bannis qui s’étaient réfugiés de Grèce en Égypte.

Mais le vieux Ptolémée mourut avant d’avoir accompli la promesse qu’il avait faite à Cléomène de le renvoyer en Grèce. Après sa mort, la cour étant tombée dans la dissolution, dans l’intempérance, et sous la domination de femmes, les intérêts de Cléomène furent négligés comme le reste. Le nouveau roi[1] était tellement corrompu par l’amour des femmes et du vin, que, dans ses moments mêmes de sobriété et de raison, il passait son temps à célébrer de fêtes, à courir dans son palais en battant le tambour pour rassembler ses gens, abandonnant les affaires les plus importantes à sa maîtresse Agathocléa, à la mère de cette courtisane, et à OEnanthès, le ministre de ses plaisirs. Cependant, à son avènement au trône, il ne laissa pas de se servir de Cléomène ; car, comme il craignait Magas, son frère, qui, à cause de sa mère, avait un grand crédit auprès des gens de guerre, il approcha Cléomène de sa personne, et l’admit aux conseils secrets où il délibérait sur les moyens à employer pour se défaire de Magas. Tous les courtisans lui conseillaient de le faire mourir ; Cléomène seul fut d’un avis contraire : il osa même dire qu’il faudrait, s’il était possible, donner au roi plusieurs frères, pour la sûreté de sa personne, et pour partager avec lui l’administration des affaires. Sur cela Sosibius, celui des amis de Ptolémée qui avait le plus de crédit, ayant fait observer qu’on ne pouvait nullement compter sur les soldats mercenaires, tant que Magas serait en vie : « Soyez sans inquiétude à cet égard, répliqua Cléomène ; il y a, dans ces troupes étrangères, plus de trois mille Péloponnésiens qui me sont dévoués, et qui, au premier signal que je leur donnerai, viendront en armes recevoir mes ordres. »

  1. Ptolémée Philopator.