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part aux Mégalopolitains de leur rendre la ville, s’ils voulaient renoncer à la ligue achéenne et devenir amis et alliés de Lacédémone. Mais Philopœmen ne voulut point que ses concitoyens acceptassent ces conditions, si douces et si pleines d’humanité qu’elles fussent, à la charge de renoncer à l’alliance des Achéens : il accusa Cléomène de vouloir moins rendre la ville que soumettre les habitants, et chassa de Messène Lysandridas et Théa-ridas. C’est ce même Philopœmen qui fut dans la suite le chef de la ligue achéenne, et qui s’acquit tant de gloire parmi les Grecs, comme nous l’avons écrit dans sa Vie[1].

Cléomène, qui jusque-là avait épargné la ville, et l’avait préservée de tout dommage, en veillant avec un soin extrême à ce que personne n’y pût dérober la moindre chose, fut tellement irrité du refus des Mégalopolitains, que, dans le premier mouvement de sa colère, il mit tous les biens au pillage, et fit transporter à Sparte des statues et des tableaux. Il rasa les quartiers de la ville les plus considérables et les mieux fortifiés, et reprit le chemin de son pays, craignant qu’Antigonus et les Achéens ne vinssent l’attaquer ; mais ils ne firent aucun mouvement. Ils se trouvaient alors à Égium, où ils tenaient conseil. Aratus, étant monté à la tribune, resta longtemps sans parler, fondant en larmes, et le visage couvert de sa chlamyde. Les assistants, surpris de le voir en cet état, le pressent de s’expliquer. « Mégalopolis, dit-il, vient d’être ruinée par Cléomène. » Les Achéens, consternés d’un malheur si subit et si terrible, rompirent l’assemblée. Antigonus essaya de venir au secours de la ville ; mais il ne put tirer assez promptement ses troupes de leurs quartiers d’hiver : il donna donc contre-ordre, et leur commanda de n’en point sortir ; pour lui, il se rendit à Argos avec un petit nombre de soldats.

  1. Cette Vie est dans le deuxième volume.