Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/15

Cette page a été validée par deux contributeurs.

orateur, et s’attacha principalement à imiter ses gestes, sa déclamation, son attention à ne parler ni promptement, ni sur tout sujet, ni sans préparation. Persuadé que c’était à ces qualités que Périclès devait sa grandeur, il en fit l’objet de son émulation, sans pour cela rejeter toujours l’occasion de se distinguer par des discours prononcés sur-le-champ ; mais il ne voulut pas aussi s’en reposer souvent sur la fortune, du succès de son talent. Ce qu’il y a de vrai, c’est que les discours qu’il prononça sans préparation avaient plus de vigueur et de hardiesse que ceux qu’il écrivait, du moins s’il en faut croire Ératosthène, Démétrius de Phalère et les comiques. En effet, Ératosthène dit que, plus d’une fois, au milieu de ses discours, il fut comme transporté de fureur. Suivant Démétrius de Phalère, un jour, qu’il parlait devant le peuple, il prononça, saisi d’une sorte d’enthousiasme, ce serment qui a la mesure d’un vers :

J’en jure la terre, et les fontaines, et les fleuves, et les eaux.

Un poète comique l’appelle Ropoperpéréthra[1]. Un autre, le raillant sur son goût pour les antithèses, s’exprime ainsi :

Il a repris comme il a pris. Car c’était la manie
De Démosthène, de se servir de cette expression.

Peut-être aussi Antiphanès a-t-il voulu par là faire allusion au passage du discours de l’Halonèse, où Démosthène conseillait aux Athéniens de ne pas prendre cette île de la main de Philippe, mais de la lui reprendre[2].

Toutefois, on convenait généralement que Démade, en

  1. C’est-à-dire vendeur de vieux haillons.
  2. Au commencement de ce discours.