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trèrent près de Pallantium[1], où Cléomène leur présenta la bataille. Mais Aratus, effrayé de l’audace du jeune homme, ne voulut pas permettre au général de risquer le combat : il se retira, accablé de reproches par les Achéens, méprisé et moqué par les Lacédémoniens, qui n’étaient pas en tout cinq mille. Sa retraite releva le courage de Cléomène : il en prit plus de confiance et de hardiesse auprès de ses concitoyens, à qui il rappela ce mot d’un de leurs anciens rois, que les Lacédémoniens ne s’informaient pas du nombre de leurs ennemis, mais seulement où ils étaient[2].

Quelque temps après, Cléomène, marchant au secours des Éléens, à qui les Achéens faisaient la guerre, rencontra, près du mont Lycée[3], ces derniers qui revenaient de leur expédition : il tomba sur eux avec tant de furie, qu’il effraya et mit en déroute toute leur armée, leur tua beaucoup de monde, et fit une grande quantité de prisonniers. Le bruit courut même dans la Grèce qu’Aratus avait péri dans cette rencontre ; mais Aratus, profitant, en homme habile, de l’occasion et de sa défaite même, tomba brusquement sur Mantinée, avant que personne pût s’en douter, s’en rendit maître, et y mit une garnison.

Cléomène, voyant que les Lacédémoniens, découragés par ce revers, refusaient de le suivre à la guerre, imagina de rappeler de Messène Archidamus, frère d’Agis, à qui appartenait de droit la succession de l’autre maison royale, persuadé que la puissance des éphores, contrebalancée par celle de deux rois, serait beaucoup plus faible. Mais ceux qui avaient fait mourir Agis, informés de ce dessein, et craignant qu’Archidamus, revenu d’exil, ne vengeât la mort de son frère, allèrent secrète-

  1. Ville d’Arcadie, qui tirait son nom de Pallas, bisaïeul d’Évandre
  2. C’est le mot qu’on attribue à Agis l’ancien, fils d’Archidamus.
  3. Montagne d’Arcadie.