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avec colère, et taxa ses projets de folie : enfin, ne pouvant l’en détourner, il rompit tout commerce avec lui, et ne voulut plus ni le voir ni lui parler. Toutefois il ne fit connaître à personne le sujet de cette rupture : il se contenta de dire que le roi ne l’ignorait nullement.

Cléomène, rebuté par Xénarès, et persuadé que tous les Spartiates étaient dans les mêmes dispositions, résolut d’exécuter seul son projet ; et, pensant que la guerre, plus que la paix, serait favorable pour opérer un changement dans l’État, il engagea sa ville à rompre avec les Achéens, qui lui avaient donné quelques sujets de plainte.

Aratus, qui jouissait chez les Achéens d’une autorité incontestée, avait voulu, dès le commencement de son administration, réunir dans une ligue commune tous les Péloponnésiens. C’était là le but où tendaient ses fréquentes expéditions et toute sa conduite politique pendant la paix : cette ligue était, à ses yeux, le seul moyen qu’ils eussent de se garantir contre les ennemis du dehors. Déjà les autres peuples s’étaient presque tous rangés à ses desseins : il ne restait plus que les Lacédémoniens, les Éléens, et ceux des Arcadiens qui étaient attachés à Lacédémone. Sitôt donc que Léonidas fut mort, Aratus se mit à harceler les Arcadiens, et à dévaster surtout les terres de ceux qui confinaient aux Achéens, voulant tâter par là les Lacédémoniens, et témoigner son mépris pour la jeunesse et l’inexpérience de Cléomène. Les éphores répondent à cette agression en envoyant Cléomène[1] se saisir du temple de Minerve qui est près de Belbine[2]. Cette place, qui est une entrée de la Laconie, faisait alors

  1. Suivant Polybe, c’est Cléomène qui fut l’agresseur, et les Achéens ne prirent les armes que pour la défense de leur territoire.
  2. Belbine, petite ville nommée aussi Bélémine, ou Blemmine, ou Bélybine, était limitrophe de la Laconie et de l’Arcadie.