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une chambre de la prison où l’on étranglait les condamnés à mort. Mais les exécuteurs n’osaient mettre la main sur lui, et les soldats mercenaires refusaient aussi comme eux d’obéir : c’était, pensaient-ils, chose injuste et contraire aux lois de porter la main sur la personne du roi. Ce que voyant Démocharès, il les menaça, les accabla d’injures, et traîna lui-même Agis dans la chambre des exécutions. Déjà le peuple, informé de l’arrestation d’Agis, se portait en tumulte et avec des flambeaux aux portes de la prison ; sa mère et son aïeule y étaient accourues, demandant à grands cris qu’on accordât au moins au roi de Sparte d’être entendu et jugé par ses concitoyens. Ils hâtèrent donc sa mort, de peur que, si la foule venait à s’augmenter, on ne leur enlevât Agis à la faveur de la nuit. Tandis qu’on le menait au lieu du supplice, il vit un des exécuteurs à qui son infortune faisait verser des larmes. « Mon ami, lui dit-il, cesse de pleurer ; car, en périssant ainsi contre les lois et la justice, je suis plus heureux que ceux qui m’ont condamné. » Et, en disant ces mots, il présenta de lui-même son cou au cordon[1].

Ampharès sortit aussitôt après à la porte de la prison, où Agésistrata vint se jeter à ses pieds. Comme il avait toujours vécu avec elle dans une étroite amitié, il la releva, et lui dit qu’on n’userait d’aucune violence, qu’on ne se porterait à aucune extrémité contre Agis, ajoutant qu’elle était libre, si elle le voulait, d’entrer auprès de son fils. Et, comme Agésistrata demanda qu’il fût permis à sa mère de l’y suivre : « Rien ne s’y oppose, répondit Ampharès ; » et, les ayant fait entrer toutes deux, il commanda qu’on fermât les portes. Il livra d’abord

  1. Suivant Pausanias, la mort d’Agis fut bien différente : il aurait péri dans une expédition contre les Mégalopolitains