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le secours de troupes que Lacédémone devait leur fournir comme à ses alliés, parce que les Étoliens menaçaient d’entrer, par la Mégaride, dans le Péloponnèse. Aratus, général des Achéens, avait déjà mis une armée sur pied, pour s’opposer à leur marche, et avait écrit aux éphores de lui envoyer leur secours. Ceux-ci dépêchèrent sur-le-champ Agis, qui ne demandait pas mieux, étant doublement animé et par son ambition naturelle et par la bonne volonté de ses soldats. C’étaient, pour la plupart, des jeunes gens pauvres, qui, n’ayant plus à craindre de se voir poursuivis pour dettes, et espérant qu’au retour de cette expédition ils verraient s’effectuer le partage des terres, se montraient merveilleusement disposés à seconder le roi : ils faisaient l’admiration des villes, qui les voyaient traverser le Péloponnèse paisiblement, sans y faire le moindre dégât, et presque sans bruit. Les Grecs, étonnés, se demandaient entre eux quelle devait être la discipline de l’armée de Lacédémone, quand elle avait à sa tête un Agésilas, un Lysandre, ou l’ancien Léonidas, puisque, commandée par Agis, qui était plus jeune qu’aucun de ses soldats, elle montrait pour lui tant de respect et de crainte. Il est vrai que le jeune homme faisait gloire de sa simplicité, de son amour pour le travail, et de n’être ni mieux vêtu ni plus richement armé que le moindre soldat : ce qui lui attirait l’admiration et l’amour des peuples ; mais la réforme qu’il venait d’introduire dans la constitution de Sparte déplaisait aux riches des autres pays, qui craignaient que l’exemple de cette innovation n’entraînât toutes les villes de la Grèce. Agis joignit Aratus près de Corinthe, comme Aratus délibérait s’il livrerait la bataille, et quelle disposition il donnerait à l’armée. Agis lui montra la plus vive ardeur, et une audace exempte d’emportement et réglée par la raison. « Je crois, dit-il, la bataille nécessaire, afin de ne pas laisser la guerre forcer les portes du Péloponnèse.