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frayé, se réfugia, comme suppliant, dans le temple de Minerve Chalciœcos[1] ; et sa fille s’y rendit suppliante avec lui, abandonnant Cléombrotus pour suivre son père. Léonidas, ajourné à comparaître, ne se présenta pas devant les juges : on le déposa par contumace, et l’on investit Cléombrotus de la royauté.

Sur ces entrefaites, le temps de la magistrature de Lysandre expira, et il sortit de charge. Les éphores qui lui succédèrent admirent la supplication de Léonidas ils le relevèrent de sa déchéance, et intentèrent un procès à Mandroclidas et à Lysandre, pour avoir, au mépris des lois, ordonné l’abolition des dettes et le partage des terres. Les accusés, qui se voyaient en danger d’être condamnés, persuadèrent aux deux rois de s’unir d’intérêt ensemble, et de ne tenir aucun compte des ordonnances des éphores. « Car, disaient-ils, ces magistrats n’ont de force que par la mésintelligence des rois : ils appuient de leurs suffrages celui des deux qui propose l’avis le plus utile, quand l’autre le combat et s’oppose à ce qu’il veut faire pour le bien public. Mais, quand les deux rois n’ont qu’une volonté, leur pouvoir est insurmontable ; et, leur résister, c’est violer les lois. Les éphores n’ont d’autre droit que de se porter pour arbitres et pour conciliateurs de leurs différends, et non de les contrôler quand ils sont d’accord. » Les deux rois, persuadés par ce raisonnement, se rendent sur la place publique, accompagnés de leurs amis : ils font lever les éphores de leurs sièges, et en établissent d’autres à leur place, au nombre desquels était Agésilas. Puis ils arment bon nombre de jeunes gens, délivrent les prisonniers, et font trembler leurs ennemis, qui

  1. Ce mot signifie qui a une maison d’airain. Ce temple, qui était tout d’airain en effet, subsistait encore au temps du voyageur grec Pausanias.