Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
LUCULLUS.

quatre mille chevaux, sur lesquels il fondait particulièrement l’espoir de son succès. Il passe le fleuve Lycus[1], et présente la bataille aux Romains. Il y eut d’abord quelques escarmouches de cavalerie, dans lesquelles les Romains prirent la fuite. Pomponius, homme distingué de leur armée, fut blessé, pris et conduit à Mithridate : « Si je te fais guérir, deviendras-tu mon ami ? lui demanda le roi qui le vit dangereusement blessé. — Oui, répondit Pomponius, si tu fais la paix avec les Romains ; sinon, je serai ton ennemi. » Mithridate admira son courage, et ne l’en traita pas plus mal.

Lucullus craignait de tenir la plaine, parce que les ennemis lui étaient supérieurs en cavalerie ; d’un autre côté, il n’osait se risquer dans le chemin des montagnes, qui était long, couvert de bois et difficile. On surprit par hasard dans une caverne quelques Grecs qui s’étaient réfugiés là. Artémidore, le plus âgé d’entre eux, s’offrit à conduire les Romains dans un lieu très-sûr pour un camp, et défendu par un fort qui dominait Cabires. Lucullus se fia à sa parole : il fit allumer des feux dans son camp, et en partit dès que la nuit fut venue. Il passa les défilés sans accident, et s’établit dans le fort, où, le lendemain, les ennemis l’aperçurent au-dessus d’eux, distribuant son armée en différents postes avantageux pour combattre quand il le jugerait à propos, et où il ne pouvait jamais être forcé, tant qu’il voudrait n’en pas sortir.

Ni Lucullus ni Mithridate n’étaient encore décidés à risquer la bataille, lorsque des soldats de l’armée du roi s’étant mis, dit-on, à poursuivre un cerf, des soldats romains allèrent au-devant d’eux pour leur couper le chemin. Les deux partis envoyèrent successivement de nouveaux secours ; et il s’engagea un véritable combat, où

  1. Un des affluents de l’Iris.