Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/33

Cette page a été validée par deux contributeurs.
29
CIMON.

des Péloponnésiens sur leurs terres, ils rappelèrent Cimon de son bannissement ; et Cimon revint dans sa patrie sur un décret proposé par Périclès. Tant les querelles particulières étaient alors subordonnées aux raisons d’État ! tant les inimitiés étaient modérées et tombaient facilement devant l’intérêt public ! tant enfin l’ambition, cette passion dominatrice entre toutes, cédait sans peine aux besoins de la patrie !

Cimon, à peine de retour dans Athènes, mit fin à la guerre, et réconcilia les deux villes. Quand la paix fut conclue, voyant que les Athéniens étaient incapables de rester en repos, et voulaient s’agiter encore et agrandir leur puissance par de nouvelles entreprises, et craignant d’ailleurs qu’ils ne se missent à troubler les peuples de la Grèce, ou qu’en parcourant avec une flotte nombreuse les îles et le Péloponnèse, ils ne fissent accuser Athènes de susciter des guerres civiles, ou ne donnassent aux alliés des sujets de plainte, il équipa deux cents trirèmes, qu’il destinait à une seconde expédition en Égypte et en Cypre[1]. Son dessein était tout à la fois d’exercer les Athéniens en les mettant aux prises avec les Barbares, et de les enrichir par des moyens légitimes, en leur faisant rapporter dans la Grèce les riches dépouilles de leurs ennemis naturels. Tout était prêt déjà pour le départ, et l’armée sur le point de s’embarquer, quand Cimon eut un songe. Il crut voir une lice irritée, qui aboyait contre lui, et qui prononçait, mêlés à ses aboiements, ces mots d’une voix humaine :

Viens, tu me feras plaisir et à mes petits.


Tout difficile à expliquer que fût ce songe, Astyphilus

  1. Plutarque n’a point parlé de la première expédition ; mais Thucydide l’a racontée en détail.