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NICIAS.

solu de s’emparer des portes aussitôt qu’ils seront instruits de leur approche, et de mettre en même temps le feu à la flotte. Beaucoup déjà sont presque en révolte, et n’attendent que leur arrivée. »

Ce stratagème est ce que Nicias a fait de mieux dans toute l’expédition de Sicile. Lorsqu’il eut, par ce moyen, tiré de chez eux tous les ennemis, et que par là il eut enlevé à la ville ses défenseurs, il partit de Catane, et à son arrivée il s’empara des mouillages, et fit occuper à ses troupes de débarquement un poste où les ennemis ne pouvaient lui faire aucun mal, malgré les avantages qu’ils avaient sur lui, et d’où il comptait, au contraire, profiter des moyens qui faisaient sa force, et conduire la guerre sans aucun obstacle.

Cependant les Syracusains, en revenant de Catane, se mirent en bataille devant leurs remparts : il conduisit aussitôt contre eux ses Athéniens, et resta maître du champ de bataille. Néanmoins il ne tua que peu de monde à l’ennemi, parce que la cavalerie syracusaine l’empêcha de poursuivre les vaincus ; et il s’occupa de couper et de détruire les ponts, ce qui fit dire à Hermocratès, pour encourager les Syracusains, que Nicias était bien plaisant d’employer toute sa science stratégique à ne point combattre, comme s’il n’avait point traversé la mer tout exprès pour combattre. Cependant Nicias jeta parmi les Syracusains tant d’épouvante et de consternation, qu’à la place des quinze généraux qu’ils avaient auparavant, ils en créèrent trois autres, auxquels le peuple s’engagea par serment à laisser un pouvoir illimité[1].

Les Athéniens, campés auprès du temple de Jupiter Olympien, désiraient fort de s’en rendre maîtres. Il était rempli d’offrandes d’or et d’argent ; c’est ce qui fit que Nicias différa à dessein, et laissa l’occasion lui échapper

  1. Ces trois généraux furent Hermocratès, Héraclide et Sicanus.