Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
98
LUCULLUS.

assuré l’amitié d’Antiochus par toutes sortes de prévenances : il le logeait chez lui, et l’opposait aux disciples de Philon, du nombre desquels était Cicéron, qui même avait composé, en faveur de sa secte, un très-beau dialogue, dans lequel il fait soutenir par Lucullus, un des interlocuteurs, cette opinion : qu’il y a des choses que l’on peut comprendre ; et soutient lui-même l’opinion contraire. Ce livre est intitulé Lucullus[1].

J’ai déjà dit que Lucullus et Cicéron vivaient ensemble dans la plus grande intimité ; ils suivaient d’ailleurs le même parti politique ; car Lucullus n’avait pas entièrement abandonné les affaires : il avait seulement laissé de bonne heure à Crassus et à Caton les rivalités, l’ambition de parvenir au premier rang de puissance et d’autorité, comme exposant à trop de dangers et d’affronts. Car c’étaient ces deux hommes que mettaient en avant, pour la défense du Sénat, ceux à qui la puissance de Pompée était suspecte. Lucullus ne descendait plus au Forum que pour obliger ses amis, et au Sénat que pour rompre quelque intrigue de Pompée, et s’opposer à son ambition. Il fit annuler toutes les ordonnances que Pompée avait rendues après avoir vaincu les deux rois ; et, soutenu de Caton, il empêcha une distribution d’argent que Pompée demandait pour ses soldats. Pompée recourut alors à l’amitié de Crassus et de César, ou plutôt à une ligue qu’il forma avec eux : il remplit la ville d’armes et de soldats, chassa du Sénat Caton et Lucullus, et fit confirmer de force ses ordonnances.

Cette conduite ayant excité l’indignation de tous les honnêtes gens, les Pompéiens produisirent un certain

  1. C’est le deuxième livre, ou plutôt, suivant Nonius, le quatrième livre des Académiques, titre sous lequel Cicéron a remanié et complété le travail qu’il avait d’abord composé en deux livres, le Catulus et le Lucullus.