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ciel une grande quantité de torches et de flambeaux allumés. Les Macédoniens ne firent rien de semblable ; leur camp était en proie à l’horreur et à l’épouvante ; un bruit courait sourdement à travers la multitude, que le phénomène annonçait la chute du roi. Paul Émile n’était pas entièrement neuf sur cette matière : il avait entendu parler des anomalies de l’écliptique, qui précipitent la lune, après certaines révolutions réglées, dans l’ombre de la terre, et la font disparaître à nos yeux, jusqu’à ce qu’ayant traversé l’espace obscurci, elle resplendisse de nouveau à la lumière du soleil. Toutefois, comme il rapportait tout à la divinité, qu’il aimait les sacrifices et se mêlait de divination, dès qu’il vit la lune reprendre sa clarté, il lui sacrifia onze jeunes taureaux. À la pointe du jour, il immola à Hercule jusqu’à vingt bœufs sans obtenir des signes favorables ; mais au vingt et unième les signes apparurent, et annoncèrent la victoire, si l’on se tenait sur la défensive. Alors il voue au dieu une hécatombe et des jeux sacrés, et ordonne aux capitaines de ranger l’armée en bataille. Ensuite, pour éviter que ses soldats eussent le soleil au visage, s’il les faisait combattre le matin, il attendit que le soleil eût baissé vers le couchant : pendant cet intervalle il se reposait dans sa tente, ouverte du côté de la plaine et du camp des ennemis.

Sur le soir, Paul Émile, suivant certains auteurs, imagina une ruse pour engager les ennemis à commencer l’attaque. Des Romains chassèrent vers leur camp un cheval débridé, et coururent pour le reprendre : ce fut là l’occasion qui fit naître le combat. D’autres racontent que des soldats thraces, commandés par Alexandre, attaquèrent un convoi de fourrages qui rentrait au camp des Romains, et que sept cents Liguriens s’élancèrent contre les assaillants. On envoya de part et d’autre des renforts considérables ; et c’est ainsi que le combat commença des deux côtés. Paul Émile devina,