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peu à peu, comme cela serait si elles devaient leur origine au mouvement qu’on fait éprouver à la terre, jaillissent tout à coup avec une grande abondance ; souvent même du sein d’une montagne, d’un rocher entr’ouvert d’un coup violent, il s’échappe à l’instant un courant d’eau rapide qui tarit de même. Mais en voilà assez sur ce sujet.

Paul Émile resta quelques jours en repos ; et l’on dit que jamais armées si considérables ne furent si longtemps en présence dans une si profonde inaction. À force de recherches et de tentatives, il apprit qu’il restait un seul passage qui n’était pas gardé ; c’était celui qui mène par la Perrhébie à la ville de Pythium et au fort de Pétra. L’espérance de franchir ce passage négligé par les ennemis l’emporta dans son esprit sur la crainte des difficultés qui avaient empêché qu’on ne le gardât : il assembla le conseil, et un des assistants, Scipion, surnommé Nasica, gendre de Scipion l’Africain, et qui eut ensuite tant d’autorité dans le sénat, s’offrit le premier à commander l’entreprise. Après lui, Fabius Maximus, l’aîné des fils de Paul Émile, et qui était fort jeune encore, se leva tout transporté d’enthousiasme. Ravi de leur bonne volonté, Paul Émile leur donne, non point ces forces considérables dont parle Polybe, mais le corps dont Nasica lui-même, écrivant à un roi pour lui rendre compte de cette expédition, dit avoir reçu le commandement[1]. Il y avait trois mille Italiens, de ceux qui ne faisaient point partie des légions ; l’aile gauche était composée de cinq mille hommes, auxquels Nasica joignit cent vingt cavaliers et deux cents Crétois ou Thraces, de ceux qu’avait envoyés Harpalus. L’expédition prit le chemin de la mer et alla camper auprès d’Héraclée[2], comme

  1. Cette partie de l’ouvrage de Polybe et la lettre de Nasica n’existent plus.
  2. Il y avait une multitude de villes qui portaient ce nom. Celle-ci était près du golfe Thermaïque, dans une province de Macédoine appelée Lyncestide.