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au plus haut point de sa prospérité. Il ajoute que son fils, mort peu de jours avant Métella ; lui avait apparu en songe, vêtu d’une méchante robe, et suppliant son père de terminer toutes ses affaires pour venir avec lui auprès de sa mère Métella, vivre en sa compagnie dans le repos et libre de tout soin. Il ne cessa pas néanmoins de s’occuper des affaires publiques : dix jours ayant sa mort, il apaisa une sédition qui s’était élevée entre les habitants de Dicéarchie[1], et régla par une loi le gouvernement de cette ville. La veille même de sa mort, averti que le magistrat Granius, lequel devait au trésor-public une somme considérable, différait de payer, et attendait sa mort pour frustrer la république, il le fit venir dans sa chambre, et ordonna à ses domestiques de le prendre et de l’étrangler. Dans les efforts que fit Sylla en criant et en s’agitant avec violence, son abcès creva, et rendit une grande quantité de sang. Cette perte ayant épuisé ses forces, il passa une mauvaise nuit, et mourut le matin, laissant de Métella deux enfants eh bas âge. Après sa mort, Valéria accoucha d’une fille, qui fut nommée Postuma, suivant l’usage des Romains, qui appellent postumi les enfants nés après la mort de leur père.

Un certain nombre de citoyens se réunirent à Lépidus, et conspirèrent avec lui pour empêcher qu’on ne fit à Sylla des obsèques dignes de son rang. Mais Pompée, malgré les griefs qu’il avait contre Sylla, car il était le seul de ses amis qu’il n’eût pas nommé dans son testament, fit tant par son crédit et par ses prières auprès des uns, par ses menaces auprès des autres, qu’il les obligea de renoncer à leur projet. Il fit porter le corps à Rome, assura au convoi une entière liberté, et rendit à Sylla tous les honneurs convenables. Les femmes, dit-on, ap-

  1. C’est le nom grec de la ville de Putéoli, aujourd’hui Pouzzoles ou plutôt Pozzuoli, où mourut Sylla.