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âges dans le culte religieux, que ce sacerdoce, où l’on ne voyait qu’un honneur, et qu’on ne recherchait que pour le titre, devint par ses soins un des arts les plus relevés, et un exemple à l’appui du sentiment de ces philosophes qui ont défini la religion la science du service des dieux[1]. Il mettait dans l’exercice de son ministère autant d’habileté que de zèle ; il était tout à ce devoir : jamais de distraction, d’omission, d’innovation. Il contestait avec ses collègues sur les manquements les plus légers, sur les moindres détails. « La divinité, disait-il, est facile et indulgente sur nos négligences, vous le croyez, et je le veux ; mais il pourrait être funeste à la république de les pardonner, et de s’en mettre trop peu en peine. Ce n’est jamais par un grand crime qu’on commence à troubler le gouvernement ; et ceux qui méprisent l’exactitude dans les petites choses négligent bien vite de veiller sur les plus importantes. »

Il porta le même esprit investigateur dans l’étude des anciennes mœurs militaires, et, dans l’observation de la discipline, la même sévérité. Jamais il ne flatta ses soldats ; jamais il ne fit servir, comme presque tous en usaient alors, un premier commandement à l’achat d’un second, en s’étudiant à complaire aux troupes par une douceur excessive ; mais, tel qu’un prêtre qui prescrirait les cérémonies de quelque grand sacrifice, il expliquait aux soldats tous leurs devoirs militaires, et se montrait inexorable envers ceux qui se rendaient coupables de transgression ou de désobéissance. Il tenait pour maxime que vaincre les ennemis n’est, en quelque sorte, qu’un accessoire, au prix de bien dresser les citoyens ; et c’est à cette conduite que sa patrie dut tant de succès.

Les Romains faisaient alors la guerre au roi Antio-

  1. Platon dans l’Euthyphron.