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ser des péans à sa louange. Voici le commencement d’un de ces hymnes :

« Nous chantons le général qui vint de Sparte, la ville immense, pour guider au combat la Grèce sacrée. Io, io péan ! »


Les Samiens rendirent un décret en vertu duquel les fêtes de Junon qui se célébraient chez eux prirent désormais le nom de Lysandries. Lui-même il avait constamment auprès de sa personne le poète Chœrilus[1], qui était chargé d’embellir des charmes de la poésie le récit de ses actions. Le poète Antilochus[2] ayant composé à sa louange quelques vers d’assez bon goût, il en fut si ravi, qu’il lui donna son bonnet plein d’argent. Antimachus de Colophon[3] et Nicératus d’Héraclée[4] luttèrent en son honneur, aux Lysandries, poème contre poème, à qui emporterait le prix. Lysandre décerna la couronne à Nicératus ; et Antimachus, outré de dépit, supprima son poème. Platon, qui était jeune alors, et qui admirait le talent poétique d’Antimachus, chercha à réconforter le vaincu désolé de sa défaite, en lui disant que l’ignorance est pour l’esprit ce que l’aveuglement est pour les yeux du corps. Enfin, le joueur de lyre Aristonoüs, qui avait été six fois vainqueur aux jeux pythiques, voulant faire sa cour à Lysandre, lui assura que s’il était encore une fois vainqueur, il se ferait proclamer l’esclave de Lysandre.

Les seuls qui eussent eu d’abord à souffrir de l’ambi-

  1. Il y a eu plusieurs poètes de ce nom, qui ont été célèbres à divers titres, mais dont il ne reste rien, et dont on ne sait plus guère que le nom, sinon pour celui qui vivait du temps d’Alexandre : Horace en a parlé plusieurs fois, et avec un grand dédain.
  2. Moins connu encore que Chœrilus.
  3. Poète épique fort estimé dans l’antiquité, et que Quintilien plaçait au second rang après Homère. Ses poésies n’existent plus.
  4. Inconnu.