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il se conservait encore, sur la foi d’anciennes prédictions. Car, dans son enfance, lorsqu’il vivait à la campagne, il était tombé dans sa robe une aire d’aigle qui contenait sept aiglons. Ses parents, étonnés, consultèrent les devins, et ceux-ci répondirent qu’il serait un homme des plus illustres, et qu’il était destiné à obtenir sept fois la plus grande magistrature et l’autorité suprême. Il y en a qui disent que ce prodige arriva en effet à Marius. D’autres rapportent que ceux qui l’accompagnaient y avaient ajouté foi pour le lui avoir entendu raconter en cette occasion et ailleurs pendant sa fuite, et l’avaient mis ensuite par écrit, quoique ce fût une pure invention ; car l’aigle ne fait que deux petits. Et ils ajoutent que Musée[1] est dans l’erreur lorsqu’il dit au sujet de l’aigle :

Elle pond trois œufs, en fait éclore deux, et ne nourrit qu’un aiglon.


Toutefois, que pendant sa fuite et dans les situations les plus désespérées Marius ait dit à plusieurs reprises qu’il arriverait à un septième consulat, c’est ce dont les historiens conviennent.

Ils n’étaient plus qu’à environ vingt stades[2] de Minturnes, ville d’Italie, lorsqu’ils virent une troupe de cavaliers qui s’avançaient sur eux, et par hasard deux barques qui étaient à flot. Tous se mirent, chacun selon ses forces et son agilité, à courir vers la mer ; ils s’y jetèrent et nagèrent vers les deux barques. Granius atteignit l’une, et passa dans une île située en face de ce point de la côte, et qu’on nomme Énaria ; mais Marius était

  1. Poète fort ancien, né à Athènes, contemporain d’Orphée et de Linus, et qui avait composé des poèmes religieux dont il ne reste à peu près rien.
  2. Environ une lieue.