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et qui, sans doute à raison de cette parenté, releva les honneurs de Marius, comme il a été rapporté dans sa Vie[1]. On rend témoignage à la continence de Marius et à sa patience dans la douleur : voici une preuve qu’il en donna dans une opération qu’il se fit faire. Il paraît qu’il avait les deux jambes couvertes de varices considérables ; contrarié de cette difformité, il résolut de se mettre entre les mains d’un médecin. D’abord il présenta une jambe, sans vouloir qu’on le liât, et supporta en silence, sans faire un mouvement, sans pousser un soupir, sans aucune altération dans les traits, des douleurs excessives, pendant qu’on lui coupait les chairs ; mais, quand le médecin voulut passer à l’autre jambe, il ne la donna point, et dit : « Je vois que l’amendement ne compenserait pas la douleur. »

Cependant Cécilius Métellus, proclamé consul et chargé de la guerre contre Jugurtha, emmena Marius en Libye en qualité de lieutenant. Là, Marius, qui se voyait en position de faire de grandes choses et de signaler son courage dans les combats, ne se mit point en peine de servir à l’élévation de Métellus, comme faisaient les autres, et de rapporter toutes ses actions à la gloire de son général. À son avis, c’était moins Métellus qui l’avait appelé à cette charge que la Fortune elle-même ; c’était elle, pensait-il, qui lui fournissait l’occasion la plus favorable, et en même temps le conduisait sur un théâtre propre aux plus grands exploits. Aussi donna-t-il des preuves signalées de sa vaillance. Il y a dans la guerre bien des difficultés et des peines : pour lui, jamais il ne craignit les travaux les plus rudes ; et il ne dédaignait pas les moindres. Il se montrait supérieur à ses égaux en sagesse et en prévoyance ; avec les soldats il rivalisait de simplicité dans le vivre, de patience dans les fatigues, et il se concilia ainsi l’affection de toute l’ar-

  1. La Vie de César est dans le troisième volume.